Accueil > Collections > Théâtre > Théâtre jeunesse > La Nuit MêmePasPeur & Petite Poucet

Galea, Claudine

La Nuit MêmePasPeur
& Petite Poucet

2009

mardi 3 novembre 2009

Les textes pour la jeunesse de Claudine Galea s’intéressent aux liens entre enfance et merveilleux, faisant une part belle à l’imaginaire et au fantasmatique, avec lucidité et poésie.

La Nuit MêmePasPeur : Comment évoquer la mort d’un proche lorsqu’elle est inéluctable et que l’on est enfant ? Comment passer du statut de vivant à celui qui n’est plus ?
Ce très beau texte, poétique, raconte l’histoire d’une petite fille, MêmePasPeur, qui va accepter petit à petit que sa grand-mère, TouteVieille, rejoigne son grand-père décédé. Elle va perdre son chat et le retrouver, apprendre le monde du dehors, comprendre que rien n’est figé mais qu’entre souvenirs, imagination et réalité, l’amour trouve sa place et lui donne de la force.

Petite Poucet
_Une petite fille offre un cadeau à une autre, blessée. Elle invente une histoire, celle d’une Petite Poucet qui a besoin d’échapper à l’emprise trop aimante de ses parents. Petite Poucet voyage en compagnie de ses six sœurs et rencontre un merveilleux Monsieur Logre. Ses sept cailloux magiques l’emmènent loin, très loin.

Une partie du texte a fait l’objet d’un album, MêmePasPeur, illustré par Marjorie Pourchet au Rouergue (2005).

La Nuit MêmePasPeur

Avec

MêmePasPeur
TouteVieille
ToutVieux
MinouGris
QuiRestentDehors
QuiReviennentLaNuit

1

MEMEPASPEUR
Il était une
Une petite fille et sa grand-mère TouteVieille
Il était une
Nuit et jour
Il était
Des gens qui
Qui dorment dans la chambre
Qui restent dehors dorment dehors
La nuit pendant que je dors
Moi la nuit même pas peur
Moi même pas peur des ombres des fantômes des QuiReviennentLaNuit

TouteVieille a un secret
Elle parle à ceux qui ont disparu
Ceux qui sont morts
Et QuiReviennentLaNuit
TouteVieille parle à ToutVieux
Moi je parle à MinouGris mon chat qui s’est sauvé par la fenêtre
Il s’est sauvé la nuit alors il revient la nuit
Et ToutVieux c’est la nuit aussi qui l’a pris
Une fois ils étaient
TouteVieille ToutVieux et MinouGris et QuiRestentDehors et QuiReviennentLaNuit
Et moi
_MêmePasPeur

2

TOUTEVIEILLE
Quand même ToutVieux tu pourrais mettre le manteau bleu que je t’ai acheté
Avec le froid qu’il fait
Et puis ne laisse pas la fenêtre ouverte
Il neige sur la couette

Tu as les doigts glacés
Mets-les sous l’oreiller
C’est comme du sent-bon
Je te respire à fond
Au fond du lit la nuit
Sans toi c’est long

3

MEMEPASPEUR
J’ai ouvert la fenêtre
Viens vite MinouGris
La neige fait des boulettes
Sur le tapis

Je me love de nuit
Viens vite MinouGris
Bijoux genoux joujoux blottis
Sous ma chemise de nuit
J’ai froid moi aussi

Pourquoi tu ne viens pas la nuit
Quand tout est endormi
MinouGris MinouGris
Je m’ennuie enfuie dans mon lit

Viens vite MinouGris
Réchauffer l’oreiller
De ma chemise de nuit


Petite Poucet

Pièce pour acteurs mais aussi, selon les options de mise en scène, voix, marionnettes, cinéma & chorégraphie.

Trois.
Six Sœurs et Petite Poucet

Plateau nu.
La lumière baisse.

« À quoi ils servent tes cailloux.
À faire le chemin.
T’iras pas loin avec sept cailloux.
Si. Avec sept j’irai partout. »

— T’es trop zarbi.
— T’es trop tout.
— D’où ils sortent ces cailloux.

— Je les ai volés. Dans la jardinière de maman. Les cailloux de la rivière de l’été, on pouvait encore pas se baigner, à cause qu’elle était trop froide, qu’on risquait l’embellie. Vous avez déjà oublié, ou quoi ? Urtica a pleuré, Yacinthe a fait la gueule, Iris a râlé, Ellébore a insisté, Acanthe a demandé son avis à papa, papa a déclaré que maman n’avait pas tort.
Moi j’ai pas oublié.
Voilà les cailloux, j’ai pris que les blancs, les autres m’intéressent pas du tout.
Les blancs, on les voit même la nuit.
C’est important de pas oublier. C’est comme les épinards pour Popeye. Ça rend encore plus forte.

« À quoi ils servent tes cailloux.
À faire le chemin.
T’iras pas loin avec sept cailloux.
Si. Avec sept j’irai partout. »

Quatre.
Mère – Petite Poucet

À table.
Lumière artificielle.
La porte est fermée.

— Finis ta soupe. Après il y a du foie de crocodile. Et de la compote de fourmis.
Je t’ai préparé ton col roulé rose, ta jupe kaki et tes collants en laine pour demain matin. Et tu mettras un bonnet. Et je t’ai fait un mot pour la piscine. Il fait trop froid pour aller nager par ce temps. Je ne veux pas que tu attrapes une otite. Dépêche-toi un peu. Tu es vraiment trop lente pour manger. Tu fais traîner. On n’attend pas papa, il rentre tard. C’est une bonne grosse soupe, avec de bons conseils pleins de bonnes obéissances, je l’ai cuisinée spécialement pour toi. Pourquoi es-tu si lente, mon Poucet. Et tu as encore oublié de fermer la porte. J’ai trop de patience avec toi. Je suis capable de te mettre au lit sans dessert. Mange ton foie. Ne fais pas la grimace. Une bonne guerre - évidemment tu ne sais même pas ce que c’est.

— Et toi maman ?

— Quoi moi ?

— La guerre, tu sais ?

— Non

— Enfin qu’est-ce qui te prend ? Je le sais c’est tout. Je l’ai appris. Par cœur. Avec des claques s’il fallait. Mais aujourd’hui il n’y a plus - Enfin bon.

— Moi je sais très bien la guerre. Je sais très bien tous les jours.

Mère éclate de rire

— Tu ne devrais pas rire. C’est triste à pleurer la guerre.

Mère se met en colère

— Allez ouste au lit. Ça t’apprendra à faire la difficile et l’insolente.

Cinq.
Petite Poucet & Six Sœurs

Plateau nu.
Dans l’obscurité.
La porte est ouverte.

Acanthe
— J’ai fait du roller sur le parking du supermarché, on se faufilait entre les voitures, leurs phares nous éclairaient.
— On t’a pas grondée ?
— Non. Ma mère a dit : il fait vraiment trop nuit, tu prendras ma lampe frontale la prochaine fois.

Ellébore
— J’ai joué sur la game boy tout l’après-midi et j’ai descendu 36 spiders, 48 monsters, 67 zombies, 141 naufragés.
— On t’a pas grondée ?
— Non, c’est un jeu, on gronde pas les enfants qui jouent.

Iris
— J’ai pris un bain moussant j’ai vidé tout le flacon, y en avait partout sur les carreaux les murs la porte.
Rires
— On t’a pas grondée ?
— Pour de la mousse ?
Rires

Orchis
— J’ai pris des nuggets un coca un milk-shake au caramel.
Ma mère aussi adore les milk-shakes, mais elle, elle préfère à la vanille.
— On t’a pas -
— N’empêche c’est écoeurant !
Rires

Urtica
— Je suis allée à une pyjama-party avec les grandes, et j’ai bu du champomy.
Rires
— Moi mes parents me grondent jamais.

Yacinthe
— Je suis restée au lit toute la journée, j’ai mangé dans le lit, j’ai renversé mon chocolat, il a fallu changer les draps. Mes parents aussi sont restés au lit, et le soir on a commandé des pizzas. C’était la fête.
Rires

—Et toi ? Oui alors toi comment c’était toi ? Toi Toi Toi Toi Toi ?
— Je me souviens plus.
— Pas vrai. T’as joué à quoi ? T’es sortie ? T’as vu un dvd ? T’es disputée avec tes soeurs ? Allée voir tes grands-parents ? Mangé une glace ? T’as perdu ta langue ? Pourquoi t’es triste ? Pourquoi tu racontes jamais ce que t’as fait le week-end ? Hein toi ? Avec tes cailloux ? À quoi ils servent tes cailloux ? Caillou caillou ! Qu’est-ce tu dis toi le caillou ? Caillou caillou caillou caillou…

Rires

« À quoi ils servent tes cailloux.
À faire le chemin.
T’iras pas loin avec sept cailloux.
Si. Avec sept j’irai partout. »

Petite Poucet
Le premier est pour l’aînée, Acanthe. Le deuxième pour la deuxième, Ellébore. Le troisième pour Iris. Le quatrième pour Orchis. Le cinquième pour Urtica. Le sixième pour Yacinthe. Le dernier, le plus petit, est pour moi. C’est le septième caillou et j’ai 7 ans. Après sept, plus rien possible, huitième caillou existe pas. Un deux trois quatre cinq six sept. Huit trop loin, huit pfuitt. Je dois me dépêcher.


Distinction

Pièces sélectionnées pour les Coups de coeur de Théâtre A La Page, Théâtre-Education en région Auvergne Rhône-Alpes, 2020-2021.

Extraits de presse

La Nuit MêmePasPeur

« Mise en scène très inspirée de Patrice Douchet, présentée au Théâtre de l’Est Parisien pour le festival 1, 2, 3, théâtre !
Ce spectacle est une très belle surprise du Théâtre de la Tête Noire dirigé par Patrice Douchet qui mène, à Saran, près d’Orléans, un travail formidable sur les écritures contemporaines.
Coup de chapeau aux quatre comédiens : Ludovic Darras, Mathieu Jouanneau, Cécile Messinéo et Marion Verstraeten pour l’interprétation et le chant de fin très réussi ! »
[Arnaud Laporte, France Culture, Tout arrive, 10 mai 2010]

« Scéniquement le spectacle est magique »
[Pariscope, n°179, du 28 avril au 4 mai 2010]

« Dans les thèmes qu’elle aborde, dans sa façon de les traiter, tout en subtilité mais surtout dans son écriture, poétique, précise, où rythme et sonorité se font écho, Claudine Galea évoque toutes sortes de sensations dans une langue épurée et imagée.
11 scènes, très courtes, pour 6 personnages, dont l’écriture laisse en creux toute la place à la création d’images et à l’imaginaire du metteur en scène. »
[Radio Aligre FM 93.1, 5 mai 2010]

« Douleur esquissée, vivacité de l’enfance, fête du rire et charme chatoyant. C’est avec infiniment de délicatesse que Patrice Douchet met en scène La nuit MêmePasPeur, texte onirique de Claudine Galea où la petite MêmePasPeur rêve de retrouver son MinouGris fugueur alors que sa grand-mère TouteVieille ne pense plus qu’à rejoindre son ToutVieux disparu.
Durant une heure, quatre acteurs, Cécile Messineo, Marion Verstraeten, Ludovic Darras et Mathieu Jouanneau interprètent cette œuvre initiatique où se dilatent doucement l’hiver et le printemps de la vie. Dans cette pièce se côtoient ainsi vivants et fantômes, revenants d’amours enfuies et de souvenir chéris, mais aussi des sans logis à l’enseigne des temps de chagrin… »
[Jean-Dominique Burtin, La République du Centre, 10 mars 2010]

« Claudine Galea nous plonge dans le monde de l’amour, du désir, des secrets à transmettre, celui où morts et vivants ont encore des choses à se dire. L’écriture est d’une tendresse infinie. »
[Patrice Douchet, Théâtre de la Tête noire]

« La Nuit MêmepasPeur... de la vie, de la mort ou l’apprentissage de l’amour et du souvenir. Ecrit dans une langue poétique qui fait briller ou ronronner les sons. »
[Annie Quenet, Griffon, n°221, mars-avril 2010]

« Dans La Nuit MêmePasPeur, par le biais de son écriture théâtrale, Claudine Galea tente de « réveiller les démons et les merveilles ». Elle nous plonge ainsi dans un monde où morts et vivants continuent à se raconter.
Sa poésie, d’une infinie tendresse, aborde aussi le problème des sans-abri. »
[Delphine Boisselier, Livrjeun, juillet 2011]


« Pièce intimiste mais pleine d’images, à mettre sous le signe de Chagall, et pleine aussi de références musicales qui émaillent le texte et l’appel à la scène. »
[Liste, Ministère de l’éducation nationale]


Petite Poucet

« Vision résolument positive, forte résonance pour les jeunes lecteurs, composition savante, écriture littéraire et scénique sobre et poétique, le tout très théâtralement contemporain, avec en plus une ouverture à ce que c’est qu’écrire : un très beau texte en tous points réussis et qui offre mille pistes d’entrée. »
[Annie Quenet, Griffon, n°221, mars-avril 2010]

« Belle écriture légère sur un thème grave. Langue simple, épurée, poétique. Beaucoup de fantaisie et de fraîcheur.
On est dans le langage des jeux enfantins.
Très belles indications de lumières dans les didascalies. Décalage d’écriture entre la première et la dernière scène et le corps du texte.
Très belle pièce pour jeune public ouverte à plusieurs types de mise en scène.
[Comité de lecture du Théâtre Jeune Public de Strasbourg, octobre 2010]

« Avec Petite Poucet, Claudine Galea nous offre une pièce de théâtre « pour acteurs mais aussi, selon les options de mise en scène, voix, marionnettes, cinéma et chorégraphie ».
(…) Claudine Galea nous parle avec émotion de l’enfance meurtrie, de la solitude, du non-droit, de l’enfermement, de la cruauté, et « de l’amour débordant, tuant » (p. 66) des parents. »
[Delphine Boisselier, Livrjeun, juillet 2011]

Le texte à l’étranger

La Nuit MêmePasPeur est traduit en letton par Agnese Kasparova.

La pièce est mise en scène et jouée par les étudiants de l’Académie de théâtre de Riga, surtitrée en français, au Théâtre de la Tête noire, Saran, le 16 novembre 2010.


— Petite Poucet est traduit en grec par Dimitra Kondylaki.

La pièce est créée au Theatre To Treno sto rouf à Athènes, dans une mise en scène de Tatiana Lygari, le 22 octobre 2012.

— Petite Poucet est traduit en russe par Tania Karaseva. Une lecture a lieu en octobre 2012 à l’Institut français de Moscou dans le cadre du festival de théâtre jeune public "Bolshaïa Peremena" ("La grande récré") organisé par le théâtre Praktika.
Nouvelle lecture dans le cadre du Festival La Grande Récré, le 7 novembre 2013.

Vie du texte

La Nuit MêmePasPeur

Sélectionné par LABO 07.

Sélectionné par l’association Athenor, section "jeunesse" de Saint-Nazaire avec six autres textes, pour la saison 2009-2010.

Pièce inscrite sur la liste de « Lectures pour les collégiens » du Ministère de l’éducation nationale.

Mise en espace de la La Nuit MêmePasPeur par Patrice Douchet, au Théâtre de la Tête noire, à Saran, le 2 avril 2009
puis le 3 décembre 2009, en présence de l’auteur.

Création dans une mise en scène de Patrice Douchet, au Théâtre de la Tête noire, à Saran (45), avec Ludovic Darras, Mathieu Jouanneau, Cécile Messineo, Marion Verstraeten, du 8 au 13 mars 2010.

Et, dans la suite, cette création est donnée à
— Nogent le Rotrou, 18 et 19 mars 2010
— au Théâtre de l’Est Parisien, lors du Festival 1,2,3 Théâtre, du 3 au 12 mai 2010.

Puis
— Théâtre de St Brice sous Forêt (95), le 19 octobre 2010
— Ensemble Poirel de Nancy (54), les 12 et 13 décembre 2010
— La Fabrique de Guéret (23), le 28 janvier 2011
— Château des ducs de Bretagne, Nantes (44), le 13 avril 2011
— Festival Saperlipopette, Domaine d’O, Montpellier (34), 14 et 15 mai 2011
— Le Préau-Centre dramatique régional de Basse-Normandie, Vire (14), 13 et 14 octobre 2011

Tournée 2012 avec avec Ludovic Darras, Mathieu Jouanneau, Cécile Messineo, Christel Montaigne
— Opéra Théâtre de Saint-Etienne, du 14 au 18 novembre

Reprise 2013 : Théâtre de la Tête noire, à Saran, 10-12 octobre.


Petite Poucet

Sélectionné par la Mousson d’hiver. Lecture dirigée par Yannick Toussaint et Thérèse Touillet, le 30 mars 2010.

— Mise en lecture sur France Culture, Atelier Fiction, dans une réalisation de Jacques Taroni, le 15 mai 2013.

— Création dans une mise en scène de Patrick Séraudie, Théâtre Folavril, avec Claude Sanchez et Anouchka Pasturel, à l’Espace JOB (Toulouse), les 11 et 12 octobre 2013.
Puis au Théâtre du Grand Rond (Toulouse) du 29 janvier au 8 février 2014.

Portfolio