Éditions Espaces 34

Théâtre traduction

Après diverses traductions liées à des mises en scène, création d’une collection "Théâtre contemporain en traduction" avec la Maison Antoine Vitez-Centre international de la traduction théâtrale

Avidya, l’auberge de l’obscurité

ISBN : 978-2-84705-279-4
EAN : 9782847052794
13x21cm, 112 p., 14.80 €
4 hommes, 4 femmes
Publié avec le partenariat de la Fondation du Japon, dans le cadre de JAPONISMES 2018

2022

Au cœur des montagnes du Japon et de leurs sources thermales, deux marionnettistes arrivés de Tokyo attendent le propriétaire de l’auberge pour présenter leur spectacle.

Ils sont accueillis par les quelques villageois qui séjournent dans l’auberge, puis par l’homme qui s’occupe des bains. Tous sont intrigués par ce nain et son fils au visage impassible venus de la ville.

Tandis que ce havre de paix et de guérison est promis à la démolition pour laisser place à une nouvelle ligne de chemin de fer, les langues se délient, les esprits s’agitent, les désirs s’insinuent.

Si avidya désigne l’illusion ou l’aveuglement dans le bouddhisme, ce voyage dans le ventre de nos désirs, aux confins des non-dits, est aussi un hommage au Japon ancestral, délicatement porté par la voix de la narratrice.

Extrait de presse

« Avidya est une auberge, dans le déni d’un monde qui s’en va, supplanté par la plaie d’une nouvelle ligne de chemin de fer qui blesse, à la vitesse du Shinkansen, les souvenirs des traditions ancestrales.

Son nom « Mumyô »-Avidya en sanscrit-, désigne le premier des douze maillons bouddhisme (nidanas), qui signifie « ignorance » ou aveuglement.

La rumeur nomme l’auberge Avidya, baignant dans les brumes thermiques de la station, « vallée de l’enfer », et raconte que les esprits qui l’habitent ne peuvent échapper à leur destin. Kurô Tanino, qui a écrit la pièce et signe la mise en scène, considère que c’est le point de départ de toute chose.

Avidya – L’Auberge de l’obscurité est une pièce, d’une rare profondeur humaine, qui nous emporte aux confins merveilleux du surnaturel.

Deux montreurs de marionnettes, un père et son fils, arrivent dans une auberge à vocation thermale. Mais le propriétaire qui les a invités par lettre, à venir présenter un spectacle, est absent.

Très vite une vieille dame, qui vit dans une des chambres communes de l’auberge, s’étonne de leur présence et de leur bizarrerie. Le fils lui semble particulier, et la trouble, d’autant plus que son père est un nain.

Au fil du temps, nos deux « étrangers » font la connaissance des habitués de l’auberge. Tous souffrent de problèmes de santé. Il y a dans la maisonnée : un aveugle qui espère voir avec « les yeux du coeur », une geisha qui aspire à enfanter, et un Sansuke qui gère la station thermale.

Après une forte demande des curistes, les marionnettistes acceptent de présenter une partie du spectacle. La représentation réveille une marionnette, difforme et démoniaque, qui agit sur l’intériorité des habitants de l’auberge.

Cet hommage de Kurô Tanino au Japon profond de ses ancêtres, est à la façon du théâtre Élisabéthain, plein de bruits sensuels et de fureur naturelle, délicatement porté par la voix d’une narratrice (peut-être l’auberge elle-même ?). »

[Dashiell Donello, Mediapart, 22 septembre 2018]


« En exergue de son texte, l’auteur dédicace la pièce à sa région natale, aux sources thermales d’Unazuki et au village de Yatsuo et au monde dis¬paru après l’ouverture du train à grande vitesse, le Shinkansen.

Les pièces de Tanino nous trans¬portent dans des lieux de la civilisation nippone ancestrale, cherchant à capturer les instants où les choses vont disparaître ou vont être perdus. (…)

La pièce nous donne à voir et à entendre par la présence du shamisen et du kokyu, un Japon en voie de disparition, de démolition, sous le coup des engins de terrassement à l’oeuvre en vue de la construction d’une nouvelle ligne de train à grande vitesse (p. 98). Le monde contemporain remplace le saké par le vin et le riz par les patates.

Cet attachement à la fois nostalgique et amusé (l’auteur souligne dans un entretien que le public japonais rit à la différence du français) à cette comédie humaine des geishas alcoolisées, du sansuke, officiant à la toilette des gens prenant un bain et fécondant les femmes en mal d’enfant, ou d’un mal-voyant maladroit, renvoie par sa forme même à des éléments de l’histoire du théâtre traditionnel.

Une récitante, en la personne d’une vieille femme, semble un avatar du narrateur, du tayu du Ningyo Johruri Bunkari, théâtre de marionnettes accompagné de musique, de l’époque d’Edo. (…

Tanino dévoile aussi le corps de ses personnages, leur nudité, leur physiologie sans pruderie aucune. (…)

Le charme de cette représentation inattendue cependant opèrera. Marionnette étrange, homonculus du neurochirurgien Penfield mettant en abyme la théâtralité et l’humanité.

Demeure la beauté de la nature, celle de la neige qui tombe comme chez Kawabata, celle des kakis orangés, des couchants magnifiques, de la cigale et de l’été revenu à la dernière scène quand le train rapide résonne au loin. (…)

Il y a dans cette pièce japonaise comme l’écho de La Cerisaiede ceux qui partent et de ceux qui restent. »

[Marie Du Crest, Le Litteraire.com, 13 novembre 2022]


« Ici, on a affaire à une auberge abandonnée, située dans une vallée très reculée et d’accès difficile. Néanmoins, des gens continuent de la fréquenter en voisins, pour s’y baigner l’été.

L’histoire commence par l’arrivée de deux personnages, un père (82 ans) et son fils (55 ans). Le père est atteint de nanisme et porte les cheveux longs. Cela le rend étrange, bien sûr. Le fils prend soin de lui. Tous deux viennent de Tokyo, à la suite d’une lettre qu’ils ont reçue, les invitant à venir dans ce lieu donner une représentation, car ils sont marionnettistes.

Mais ils ont beau appeler, l’auberge semble vide. Qui a bien pu envoyer cette invitation, alors qu’il n’y a personne pour les accueillir ?

Mais nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Cet endroit vide s’avère très fréquenté. Une aveugle vous masse, un serviteur oublié là, continue de servir, des geishas viennent s’entraîner à jouer de leur shamisen. Là, au moins, elles ne sont pas en butte aux protestations des voisins.

Le dispositif tournant recommandé comme scénographie permet de faire coexister différentes scènes qui se déroulent en même temps au rez-de-chaussée et à l’étage. Sans doute, le spectateur devrait apprécier et suivre avec intérêt cette drôle d’histoire de va-et-vient, de bains et de massages, de conversations étranges, comme un ballet continu et insensé.

Chaque personnage semble rejouer indéfiniment le rôle qu’il a tenu dans sa vie, faisant du thé, cueillant des herbes, jouant du shamisen ou tenant des propos obscurs. Les visiteurs eux-mêmes finiront par donner un bref spectacle de marionnettes. Mais à la question initiale « qui a bien pu envoyer l’invitation aux marionnettistes », il ne sera pas répondu. »

[Nicole Fack, Théâtre Actu, 10 juillet 2023]

Vie du texte

Création en japonais surtitré dans une mise en scène de l’auteur au
Festival d’automne de Paris en 2016 ;
Festival d’automne de Paris, T2G Théâtre de Gennevilliers, Centre Dramatique National, en 2018.

Haut