Éditions Espaces 34

Théâtre traduction

Après diverses traductions liées à des mises en scène, création d’une collection "Théâtre contemporain en traduction" avec la Maison Antoine Vitez-Centre international de la traduction théâtrale

Soeur de

Ils vont lâcher les chiens
Bientôt
Bientôt ils vont lâcher les chiens
D’abord on les entend hurler
Ouuuu Ouuuuu

Vous entendez ?
Le hurlement sans fin
Le matin quand on s’éveille
Et parfois la nuit aussi
C’est juste avant qu’on les lâche qu’ils hurlent le plus fort
Je le sais
Je le sais maintenant
Je l’ai appris en tendant l’oreille pendant des années
C’est juste avant qu’on les lâche que les chiens hurlent le plus fort

Ouuuu Ouuuuu
Ouuuu Ouuuuu

Vous entendez ?

Ces chiens et moi, il y a quelque chose, une chose entre eux et moi
Je les entends
Je les entends tout le temps
Je les ai toujours entendus depuis le temps que je suis ici
Je dirais… depuis des milliers d’années, mais je n’en sais rien
N’en parlons plus, disons que je les entends depuis très très longtemps

Au début j’en étais… j’en avais des haut-le-coeur
Ou de l’angoisse
Ces hurlements
Ils avaient quelque chose de… sinistre… l’annonce d’un désastre ?
Les chiens qui hurlaient jadis
Hors des portes de la ville
Quand le jour tombait
Au moment où plus personne ne sortait
Sauf pour fuir
Pour disparaître

Ouuuu Ouuuuu

Maintenant cela me… tranquillise
L’idée que je ne suis pas… seule
Pas tout à fait seule


Il y a longtemps que je n’ai plus parlé

Pendant longtemps j’ai seulement parlé là-dedans
(elle montre sa tête)
J’ai mené là des conversations interminables
Mais parler ?
Parler à voix haute ?
Faire des phrases qui se suivent
Une histoire
Avec une tête et une queue
Ça… c’est neuf pour moi, oui, enfin
Pas vraiment tout neuf tout neuf, du jamais fait
C’est plutôt…
Tellement loin

Tout est si loin dans le passé


Maintenant tout est tranquille
Vous entendez ?
Soudain tout est tranquille, on n’entend plus rien
C’est le moment où ils sont lâchés
Si vous avez l’oreille très fine vous entendez renifler oui
Puis vous sentez le vent le courant d’air quand ils agitent la queue
Mais non, ça vous ne le sentez pas
Sentir ça, ce serait… surhumain
Et surhumaine je ne le suis pas
Être surhumaine c’est quelque chose… de surhumain oui
...

Je voudrais bien savoir ce qu’on attend de moi
Ici
Maintenant
Ce qu’on attend de moi ici
Si je savais je le ferais tout simplement
Je ne suis pas récalcitrante
Je suis très accommodante
Pas que je sache faire grand chose
Mais je peux toujours essayer
Alors si vous voulez
Si vous voulez quelque chose de moi
Je veux dire, vous voulez sans doute quelque chose
Ou bien… vous attendez quelque chose
Tout homme veut quelque chose
Attend quelque chose
Tout homme
Tout être humain
Et qu’êtes-vous ?
Eh bien oui, la plupart des êtres veulent quelque chose
Même si la plupart du temps eux-mêmes ne savent pas quoi
Quand on le leur demande
Ils désirent tout de même…quelque chose
Je veux dire…

J’ai toujours pensé…
Oui bon pas toujours
Parfois
Espéré
Prié peut-être ?
Qu’un beau jour ici… quelqu’un viendrait
(je n’ai jamais su qu’il y en aurait autant)
Quelqu’un
Qui viendrait me… juger ?
Qui déciderait sur la base de… la bonne conduite ?
Ou de la juste VISION des choses ?
Déciderait où je dois aller
Après ceci
S’il y a un après naturellement
Je ne le sais pas
On peut réfléchir longuement à la mort
Quand on est encore en vie
Mais quand on est mort…
Ça s’arrête

Extraits de presse

« Un solo contant le monologue intérieur que se raconte Ismène, après la mort violente de chacun des membres de sa famille.

Seule survivante, elle s’interroge sur les notions de courage, de destin, d’absolu et de responsabilité. Des questions qui touchent à l’universel et renvoient la question au public : et vous, qu’auriez-vous fait ? Auriez-vous défié l’autorité de Créon pour enterrer votre frère au péril de votre vie ?

Dans le rôle d’Ismène, Patricia Pekmézian réussit la prouesse de tenir en haleine le public durant une heure. Elle le transporte dans un royaume sans date ni géographie. (…)

[Isabelle Dupont, Nord éclair, 14 décembre 2012]


« A la fois mythologique et universel, le texte de Lot Vekemans transmet la force du destin d’Ismène tout en le rendant très contemporain. (…)

Arnaud Anckaert et son équipe s’en emparent avec brio pour en donner une vision elle aussi moderne et très pertinente, loin des paillettes. »

[Sortir, 12-19 décembre 2012]


« Sœur de fait référence à Ismène, la sœur d’Antigone, qui incarne la figure de l’anti-héroïne. Dans ce monologue, elle est hantée par ce qu’elle n’a pas fait, ses frères qu’elle n’a pas enterrés alors qu’Antigone l’a payée de sa vie.

« Le mythe grec est présent, mais en même temps le personnage a des références concrètes et contemporaines. Du coup, le spectateur est déstabilisé » explique le metteur en scène. »

[La Voix du nord, 7 décembre 2012]

Vie du texte

Lecture dirigée par Tanya Hermsen lors du Festival "Ecrire et mettre en scène aujourd’hui", Panta Théâtre, Caen, le 7 juin 2008.


Lecture par Gabrielle Calderoni, dirigée par François Leclère, Salon du théâtre, Paris, le 22 mai 2010.


Dans le cadre du festival l’Europe des Théâtres, lecture à l’Institut néerlandais par Marianne Auricoste, le 22 juin 2011.


Création dans une mise en scène d’Arnaud Anckaert, Théâtre du Prisme, avec Patricia Pekmezian, à La Ferme d’en Haut, Villeneuve d’Ascq (59), le 7 décembre 2012.

Tournée de création 2012-2013
— L’Antre 2, Lille, 13 et 14 décembre
— Centre Culturel Daniel Balavoine, Arques (62), 20 décembre
— L’Atelier Culture La Piscine, Dunkerque, 17 janvier
— Pipots, Boulogne sur mer, 25 janvier
— La Verrière, Lille, du 27 au 29 mars


Création dans une mise en scène d’Emilie Joumard avec Pauline Thireau, Théâtre des Clochards Célestes (Lyon), du 29 janvier au 13 février 2013.

Tournée de création 2014
— Théâtre de Gleizé (69), 7 février
— Espace Albert Camus (Bron, 69), 13 février

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