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Galea, Claudine

L’heure blanche &
Toutes leurs robes noires

2009

mardi 3 novembre 2009

Les textes pour la jeunesse de Claudine Galea s’intéressent aux liens entre enfance et merveilleux, faisant une part belle à l’imaginaire et au fantasmatique, avec lucidité et poésie.

L’heure blanche
Blanche est une enfant mystérieuse. Autour d’elle, une lumière, blanche.
D’où vient-elle ? De la mer, du soleil, d’une mémoire aveuglante ? Ou d’un désir immense qui propulse vers l’avenir, la vie, les commencements, et qui s’appellerait l’éblouissement de l’amour ?

Toutes leurs robes noires : c’est l’heure ritualisée du coucher. Un enfant (dont le sexe n’est pas précisé) demande une histoire à sa maman. Elle fait plusieurs tentatvies mais ne raconte pas celle qu’il souhaite entendre. Il veut celle qui parle de la nuit, présente dans la chambre sombre. La maman ne comprend pas. Alors l’enfant explique : la nuit qui nous entoure, nous parle, nous guide, est celle qui va l’emporter loin pour des voyages inconcevables avec l’amour au bout.

L’heure blanche

Je m’appelle Blanche.

Je porte des robes blanches des culottes blanches des socquettes blanches et des tennis blanches.

Je n’aime pas la nuit.

Je n’aime pas les jeux d’enfants. Je n’aime pas plonger dans la piscine. Jouer à cache-cache. Je n’aime pas qu’on me fasse tourner avec un bandeau sur les yeux pour avancer à tâtons à la recherche des autres qui gloussent qui rient qui poussent des cris et appellent : Blanche par ici, Blanche par là.

J’aime l’été. Le sable dans l’île et l’heure de midi.
J’aime quand il n’y a pas d’ombre. Que les ombres même sont blanches.

C’est un pays très chaud où ma mère est née et m’emmène en vacances.

A midi personne ne sort.
Moi je vais jusqu’au bout du port et je vois tout ce que j’aime voir.

La plage à droite comme un voile de mariée.
La plage n’en finit plus de couler vers l’horizon. Une jeune fille en blanc marche sur la plage, la mariée entre dans la mer. Je la perds. Elle devient le ciel le sable l’eau et le soleil.

Ma mère accourt pour me mettre un chapeau blanc sur la tête.
Ma mère a une jupe blanche et un dos nu blanc. Et des lunettes de soleil noires.

Je déteste les lunettes de soleil.

Ma mère dit des mots : folle insolation trop chaud midi aveuglant mourir.

Je ne comprends pas ce qu’elle dit.
Je ne suis pas comme elle. Je n’ai pas chaud, pas mal à la tête et mes yeux aiment la lumière.
(...)


Toutes leurs robes noires

Personnages

L’enfant, La mère, La nuit, Le père

& éventuellement
La narratrice ou Le narrateur

Le texte en romain n’est pas attribuable à un personnage en particulier.
Il peut être réparti entre tous, donné à l’un d’entre eux ou bien à une narratrice ou un narrateur.

Tout ce qui est en italique est dit par les personnages.


L’enfant est dans son lit.
Sa mère est allongée à côté sur le lit.
Nuit noire.

Raconte-moi l’histoire, dit l’enfant

Il était une fois une petite fille aux très jolis cheveux bouclés et dorés

Pas celle-là, dit l’enfant

Une princesse vivait dans un château avec une marâtre très très méchante

Pas celle-là, dit l’enfant

Il était une fois un bûcheron et une bûcheronne qui avaient sept enfants, tous des garçons

Pas celle-là, dit l’enfant.

La mère se tait.
L’enfant attend. On les entend respirer.

Quelle histoire veux-tu, demande la mère

L’histoire qui est là

La mère se tait.

L’histoire, là

L’enfant montre, tend sa petite main dans le noir.
La mère se tait.

Tu la vois, là

Non je ne la vois pas, dit la mère

Elle est là, dit l’enfant

L’enfant montre à nouveau.
La mère se tait.

Là, demande la mère

Elle montre à son tour, elle étend son bras plus grand que celui de l’enfant.

Oui, là, dit l’enfant

La mère se tait.
L’enfant s’agite dans son lit.

L’histoire, là, elle attend, dit l’enfant
Elle attend dans le noir, insiste l’enfant

Je ne sais pas, dit la mère

C’est celle-là que je veux, dit l’enfant

La mère se tait.
La mère s’agite sur le lit.

L’ombre de l’enfant remue, et l’ombre de la mère remue également.
Dans le noir de la chambre, leurs ombres sont claires.

Tu sais bien, dit l’enfant, l’histoire qui est là dans le noir
Dans le noir il y a une histoire, l’histoire du noir, c’est celle-là que je veux

Je ne sais pas, soupire la mère

Raconte, dit l’enfant
C’est elle que je veux, dit encore l’enfant

La mère se tait.

Tu racontes toujours les mêmes histoires, dit l’enfant
Pourquoi tu ne racontes jamais celle-là, celle que je veux, demande l’enfant
histoire noire, dit à nouveau l’enfant

Je ne sais pas, soupire la mère qui s’agite encore un peu

Ça fait longtemps qu’elle attend
aussi j’attends, dit encore l’enfant
Je la vois, elle attend
Tu la vois, là


Extraits de presse

L’heure blanche

 « (…) un texte puissant, écrit dans un style exigeant mais simple, sans égard délibéré pour la mise en scène, à lire aux enfants doucement, de manière tout aussi saccadée. »

[Delphine Boisselier, Livrjeun, février 2011]

 « Dans ce spectacle tout en douceur, entre poésie et tendresse, Hélixe Charrier parle de l’absence, de la disparition d’un être cher. Les illustrations de Charlotte Lemaire animent ce récit avec fraîcheur et sensibilité. »

[Unividers, 27 décembre 2021]


Toutes leurs robes noires

 « Toutes leurs robes noires est un hymne à l’amour qui rejoint l’imaginaire de l’enfant avec lucidité et poésie. La construction théâtrale est simple, le style dépouillé et clair, les dialogues des personnages pourraient aisément être mis en espace puis en scène.
A découvrir pareillement, avec l’attention fine d’un lecteur à l’écoute de sa voix intérieure. »

[Delphine Boisselier, Livrjeun, février 2011

 « Le conte est initiatique. Pour conjurer sa peur, l’enfant va à la rencontre de la nuit. Lui qui apparait en creux dans la pièce abandonnera lentement ses parents pour affronter ses peurs sans aide, sans soutien ; il saura quitter le nid. A la fin du cycle le couple parental se retrouvera.

La pièce nous transporte dans le monde insolite de l’entre deux. »

[Toutelaculture.com, décembre 2021]

Vie du texte

L’heure blanche

— Lecture par Dominique Journet Ramel au Théâtre de la Tête noire, à Saran , le 2 avril 2009.

— Mise en lecture sur France Culture, Atelier Fiction, dans une réalisation de Jacques Taroni, avec Pauine Ziadé le 15 mai 2013.
Rediffusion sur France Culture, le 19 mars 2023.

— Création dans une mise en scène d’Anne Sicco, compagnie L’œil du silence, à Anglars-Juillac (46), les 26 octobre et 2 novembre 2013.

— Création par la Compagnie Rumeurs des Vents dans une mise en scène d’Hélixe Charier, interprétation et manipulation d’Adélaïde Poulard et Matthias Sebbane, au Nouveau Théâtre de Châtellerault (86), les 6 et 7 février 2022.

Tournée 2022
— Théâtre Charles Trenet, Chauvigny (86), le 22 mars
— Cap Sud, Poitiers (86), le 6 avril

Tournée 2023
— Espace Signoret, Canejan (33), 24 janvier


Toutes leurs robes noires

— Lecture par Claudine Galea, St Paul Trois Châteaux, le 4 février 2011.

— Création dans une mise en scène de Patrick Séraudie, Théâtre Folavril, avec Claude Sanchez et Anouchka Pasturel, Espace JOB (Toulouse), 11 et 12 octobre 2013.
Puis Théâtre du Grand Rond à Toulouse, du 29 janvier au 8 février 2014.

— Création dans une mise en scène d’Antoine Hespel avec Najda Bourgeois, Baptiste Mayoraz, Le Préau CDN de Normandie – Vire en partenariat avec l’école du TNS le 7 décembre 2021 à Tessy-Bocage, puis
Sourdeval, le 9 décembre
Bény-Bocage, le 11 décembre 2021

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